La croissance des qualités

Un élément clé de la dynamique humaine dans les sociétés modernes est certainement la croissance. Croissance individuelle, attendue par chacun pour soi-même et pour sa descendance ; croissance économique et sociale, sensée assurer la première.


Historiquement, les femmes et les hommes de ces sociétés ont surtout recherché une croissance quantitative. Plus de mètres carrés pour leur logement, de moyens et d’occasions de se déplacer, de calories dans leur assiette, d’années à vivre en bonne santé et même de connaissances dans leur cerveau … Consolidée, cette croissance aboutit à peu ou prou à plus de PIB.


Aujourd’hui, la croissance des quantités est remise en cause. Comme le rappelle l’excellent Alternatives Economiques (Hors-série L’économie durable) au-delà d’un certain seuil de revenus, estimé à 15-18.000 $ / an, les revenus marginaux n’entraînent de progrès ni dans l’espérance de vie, ni au niveau de la santé, ni dans la sensation d’être heureux. Sur le plan de la planète, les ressources nécessaires à la croissance des quantités dépassent dès maintenant celles disponibles en eau, air propre, terres cultivables et matières premières.


Un point clé (peut-être un point d’inflexion, celui de la rupture de paradigme) serait de passer à une croissance, non pas seulement plus durable (toujours plus, mais avec moins d’effets secondaires), mais à une croissance des qualités.

Pour lutter contre le stress, il faut s’intéresser à la personne avant le groupe

Stress, suicides dans l’entreprise … où va-t-on ? Je trouve sur le site de Libération le questionnaire sur le stress envoyé aux 100.000 collaborateurs de France Telecom.


Soit plus de 170 questions, toutes frappées au coin de la bonne science du stress. Pourtant, je m’interroge. S’il s’agissait de faire une enquête statistique sur le stress dans cette population, il suffisait d’interroger un millier de personnes. Statistiquement, en interroger cent fois plus n’apporte quasiment pas d’information supplémentaire.


Non, si l’on a interrogé tous les collaborateurs, c’est qu’il y a un message. Probablement quelque chose du type : “nous avons envie de connaître VOTRE situation, car c’est de VOUS dont nous nous préoccupons maintenant”.


Hélas, ce n’est pas ce que vont ressentir les collaborateurs de France Telecom. Ce qu’ils verront, c’est que leur entreprise se préoccupe DU STRESS. C’est à dire des suicides. De son image … mais toujours pas d’eux.

Michael Jackson, reflet de notre identité collective ?

Une identité collective se détermine entre autres par la trace imprimée par les membres les plus représentatifs de la collectivité. Dans les entreprises, on peut observer combien chacun, dans la chaîne hiérarchique, a tendance à mimer les comportements du leader charismatique.


Aussi bien, il est intéressant d’analyser le phénomène Michael Jackson, figure de proue de notre collectivité humaine. Faisons le compte. M. Jackson a révolutionné la musique ? Soit, un point.


Mais, flambeur, il laisse des dettes considérables. Moins un point. Il a essayé de changer son image, reniant sa couleur de peau. Manque de sagesse élémentaire. Moins un point. Encore un point à enlever pour son comportement manifestement asocial, qui l’a conduit se claquemurer dans son palais. Je n’enlève qu’un point pour ses perversions sexuelles ; si elles étaient prouvées, ce serait plus cher. Des points perdus également pour les conditions de sa production de génie : drogues et médicaments…

Ces émotions qui guident le monde

Sensible à l’influence des émotions, je ne pouvais manquer la lecture du “premier livre à explorer la dimension émotionnelle de la mondialisation”, autrement dit La géopolitique de l’émotion, de Dominique Moïsi.

Pour l’auteur, soient trois émotions : l’espoir, l’humiliation et la peur, qui se partagent le monde. L’espoir est un fruit d’Asie, l’humiliation vient du monde arabe et la peur germe en Europe et aux Etats-Unis. De ces émotions découleraient de nombreux comportements que l’auteur observe avec perspicacité.
Voici un livre intéressant, qui nécessitera des études plus poussées pour valider les intuitions de son auteur.

Mais, page 150, je trouve ce qui me semble être la clef de voûte de toutes les émotions collectives dont il parle : la fierté.

Un team building planétaire

Le saviez-vous ? Nous vivons un grand moment de team building planétaire. Notre animateur n’est autre que le virus de la grippe mexicaine. Son objectif : nous faire comprendre que nous ne formons qu’une seule équipe, et qu’il serait futile, voire dangereux d’essayer de nous protéger sans penser en même temps à la protection de nos coéquipiers.

Un article du Monde détaille les travaux de Marc Barthélémy, un chercheur du CEA. Celui-ci explique : Nous avons simulé la propagation d’une maladie de type grippal transmissible entre humains et avons testé deux stratégies d’utilisation des stocks de médicaments antiviraux disponibles à travers le monde. Dans la première stratégie, chaque pays utilise ses stocks égoïstement en les réservant à sa propre population. Dans la seconde, les pays les plus riches envoient une petite part - de l’ordre de 10 % à 20 % - de leurs réserves aux premiers pays touchés par l’épidémie. Dans nos simulations, cette gestion “altruiste” ou “collaborative” des stocks d’antiviraux réduit l’impact de la pandémie. Par rapport aux résultats donnés par une gestion “égoïste”, le nombre de cas mondial peut être divisé par 10 à 1 000 selon le pays et la saison au cours de laquelle se déclenche l’épidémie.

Finalementent, la grippe porcine, occasion d’expérimenter de nouveaux comportements altruistes, ne serait-elle pas une bénédiction ?

Laurent Ryckelynck

Team building à la Rolling Stones

Les Rolling Stones sont-ils des seigneurs du team building ? C’est ce que je me suis demandé en regardant hier le DVD de « Shine a ligth », le film de Martin Scorsese sur un concert des Rolling Stones au Beacon Theater de New York.

Dans son acception la plus large, le team building consiste à rapprocher des personnes. Généralement, une expérience commune est un bon moyen pour créer un vécu fort, source de liens. A ce titre, les concerts rock sont un moment d’une intensité remarquable, et il suffit de regarder la foule pour se convaincre qu’un courant passe et réunit les spectateurs.

D’où la tentation de procéder de la même façon pour souder des équipes. Pour autant, est-ce une bonne idée ? Non, bien sûr, pour deux raisons au moins, évidentes mais qu’il est bon de rappeler.

Apprendre de l’expérience des autres


Confrontés à la perspective d’une nouvelle expérience, nous nous projetons dans le futur pour imaginer le bénéfice que nous en retirerons. Dans ce but, nous avons tendance à anticiper le bonheur futur sur la base de nos propres évaluations et jugements de l’événement à venir. Quoi de plus naturel !


Daniel Gilbert, professeur de psychologie à Harvard, est un spécialiste reconnu de la science du bonheur. Il vient de mener une étude, publiée dans Science, dont les résultats bouleversent les idées préconçues.



Les gens ne réalisent pas quelle puissante source d’information l’expérience d’une autre personne peut être déclare le Pr Gilbert.

Changer les comportements grâce au paternalisme libertaire

Pour tous ceux qui s’intéressent aux changements de comportements, voici une nouvelle piste intéressante : le paternalisme libertaire. Un oxymore de plus ? Pas du tout, répondent Richard Thaler et Cass R. Sunstein, deux chercheurs américains, tendance behavioriste.


Je dois dire qu’ils ont un exemple choc. Suivez-les aux toilettes, et mettez-vous dans la peau de dame-pipi. Comment garder propres les urinoirs dont vous avez la charge ? Vous pourriez rédiger des écriteaux invitant à “laisser cet endroit … etc”. Ou menacer les contrevenants d’une amende. En désespoir de cause, vous pourriez faire payer l’usage de ce lieu à hauteur des coûts de nettoyage … Essayez plutôt de dessiner une mouche au fond des urinoirs. Et souvenez-vous : les hommes -anciens chasseurs- adorent viser, quelle que soit l’arme dont ils disposent. Essayée dans les toilettes de l’aéroport d’Amsterdam, la méthode aurait diminué les éclaboussures sur le sol de 80%.